Mangez du chocolat, il va coûter le prix du caviar
Selon les chocolatiers français, les prix ont augmenté de 2 % cette année. Thierry Creux
C’est bientôt Noël. Ruez-vous sur les chocolats, mangez-en plein, profitez-en ! Dans quelques années, il pourrait devenir un vrai produit de luxe.
Des experts de l’industrie du chocolat prédisent même qu’il « coûtera aussi cher que du caviar dans vingt ans ».
En cause, le cours du cacao, qui a atteint son niveau le plus haut depuis trente-trois ans : trois dollars la tonne de fèves. La valeur de cette matière première a triplé depuis 2004.
En Suisse, autre pays amateur de chocolats, les fabricants viennent d’augmenter les prix d’une partie de leur assortiment. De 2 % à 15 % ! « Nous avons dû adapter les prix d’une vingtaine d’articles, dont certains de la marque Lindt », confirme Sabine Vulic, porte-parole du groupe suisse Coop. Du côté des géants comme Nestlé (Nesquik, KitKat…), on confesse aussi des augmentations, « de l’ordre de 2 % à 4 % ».
En France, ce Noël ne devrait pas trop grever les budgets. « Une seule augmentation dans l’année, de 2 % », indique la maison Guerlais, à Nantes, comme les collègues chocolatiers français. Mais ces derniers redoutent de brusques évolutions du prix de la matière première, si les spéculateurs s’en mêlent. Tel le Britannique Anthony Ward, surnommé « Chocolate Finger ».
Si les spéculateurss’en mêlent…
En juillet, il a racheté, en une fois, 7 % de la production mondiale de fèves, soit près de 240 100 tonnes (aidé par des banques comme BNP Paribas). « Il a tenté de nous enlever le cacao de la bouche en nous faisant payer le prix fort », ont commenté des spécialistes de la production.
Moins rapidement, mais plus sûrement que la spéculation, c’est la mauvaise santé des plantations qui risque de peser sur les prix. En Côte d’Ivoire, où pousse 38 % de la production mondiale (21 % pour le Ghana, deuxième producteur), les paysans ont tendance à délaisser leurs cacaoyers pour la culture de l’hévéa, plus rentable. Quand ils n’abandonnent pas les campagnes pour une vie meilleure, en ville.
La faute à des pratiques vieillissantes, qu’aucun progrès scientifique ne vient remettre en question. « Malgré les 6,5 millions de petits producteurs dans le monde, la culture du cacao ne bénéficie pas d’études agronomiques sérieuses », indique le journal britannique The Independent.
Des grands groupes se préoccupent aujourd’hui de la base de leur matière première en finançant le séquençage du génome du cacao ou en projetant de replanter dix millions d’arbres d’ici à 2020. Mais n’est-il pas trop tard ? Les Indiens et les Chinois, jusqu’ici peu amateurs, commencent à apprécier le chocolat…
Plus d’informations dans le journal Ouest-France
[via] Christelle Guibert, ouest-france.fr